Asile : la Cour européenne des droits de l'homme rappelle la France à son obligation de protection des réfugiés

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Asile : la Cour européenne des droits de l’homme rappelle la France à son obligation de protection des réfugiés

2 février 2012 - Amnesty International

La France vient d’être condamnée par la Cour européenne des droits de l’homme qui lui reproche d’autoriser le renvoi de demandeurs d’asile dans leur pays sans attendre la fin de l’examen de leur demande d’asile par la Cour nationale du droit d’asile.

Une législation défaillante parce que dangereuse

En 2011, près de 26% des demandeurs d’asile en France ont vu leur demande examinée selon la procédure prioritaire. La principale conséquence de cette procédure est d’autoriser un préfet à renvoyer un demandeur d’asile dans son pays, avant la fin de l’examen de sa demande d’asile. En cas de rejet de la demande d’asile par l’Office français de protection des réfugiés et apatrides – OFPRA – les demandeurs d’asile peuvent saisir la Cour nationale du droit d’asile pour obtenir la révision de cette décision. Cependant, avant même qu’une décision finale ne soit rendue sur leur situation, la loi française autorise le renvoi des demandeurs vers leur pays.

La France, par cette procédure, institutionnalise donc une prise de risque inacceptable : le risque de renvoyer une personne en des lieux où elle pourrait être persécutée, sans avoir examiné auparavant, et de façon approfondie et complète, si de tels risques existaient ou pas.

Une législation contraire au droit international des droits humains

Amnesty International France, aux côtés de l’ACAT-France et de Human Rights Watch, n’a cessé depuis cinq années d’interpeller à différentes occasions les autorités françaises pour demander que la législation soit mise en conformité avec les traités et conventions protégeant les droits humains.

Les trois organisations ont conduit un long plaidoyer auprès des parlementaires pour qu’ils se saisissent de cette lacune. A l’occasion des débats parlementaires sur des projets de lois relatifs à l’asile, des amendements ont été déposés pour introduire le droit à un recours suspensif pour tous les demandeurs d’asile devant la Cour nationale du droit d’asile. Régulièrement de nombreuses questions écrites et orales ont été formulées par les parlementaires à l’attention du gouvernement.

Elles ont également conduit des actions de plaidoyer auprès d’instances internationales pour attirer leur attention sur les dangers de cette procédure pour les réfugiés et la nécessité de réformer cette procédure.

Depuis 2006, au sein des Nations unies et du Conseil de l’Europe, les instances de surveillance du respect des textes internationaux – au premier titre desquels la Convention relative au statut des réfugiés, le Pacte international relatif aux droits civils et politiques, la Convention des Nations unies contre la torture, ou la Convention européenne de prévention de la torture, n’ont cessé de régulièrement recommander à la France de remédier à l’absence de recours suspensif devant la CNDA pour les demandes d’asile en « procédure prioritaire ».

Une décision qui doit permettre la révision en profondeur de la loi française

En considérant que si « les recours exercés par le requérant étaient théoriquement disponibles, leur accessibilité en pratique a été limitée par le classement automatique de sa demande en procédure prioritaire », la Cour européenne des droits de l’homme constate que la législation française n’est pas conforme aux obligations de la France en matière de protection des réfugiés.

La Cour met notamment en cause « l’insuffisance de l’assistance juridique et linguistique » à l’égard du requérant, mais aussi « la brièveté de l’entretien devant l’OFPRA » et « la brièveté des délais de recours ». La loi doit donc être révisée pour permettre un examen complet et rigoureux de toutes les demandes d’asile.

Au mois de juillet 2010, AI France, l’ACAT France et Human Rights Watch avaient diffusé auprès de parlementaires un argumentaire en faveur de l’introduction du droit à un recours suspensif accompagné d’une proposition de loi. Avec cette décision de la Cour européenne des droits de l’homme, les trois organisations vont poursuivre leur plaidoyer pour que la réforme à venir mette en place une procédure réellement protectrice des droits des demandeurs d’asile.

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