Calais, toujours sur la route
5 août 2014 - La Voix du Nord - Olivier Berger
Pour bien faire, il faudrait bouger l’Angleterre. Pardi ! La déplacer quelque part, entre l’île de Lampedusa, les côtes libyenne et tunisienne. Voilà qui éviterait les drames, les noyades, les souffrances, les révoltes, les bastons générales pour un territoire, les rackets, les passeurs, les castagnes avec les routiers, les épidémies de gale, les troubles psychologiques, les ras-le-bol des riverains, les coups de matraque et les gazages, les tracasseries administratives, les humiliations. Oui mais Calais est sur la route de l’Eldorado de la Grande-Bretagne.
Depuis toujours et pour longtemps, sans remonter au camp du Drap d’or, François Ier et Henri VIII. Il en est ainsi malgré la ligne de l’espace Schengen, malgré les accords du Touquet de 2003 qui déplacent concrètement la frontière britannique sur notre sol, malgré les lois de plus en plus restrictives votées au Royaume-Uni pour limiter l’immigration. Rien n’y fait. On tente le tout pour le tout en rêvant de se fondre dans la masse outre-Manche, le pays sans carte d’identité, où un contrôle policier doit être motivé par formulaire.
Calais, passage obligé des désarrois humains
Depuis 1999, la guerre au Kosovo et le hangar de Sangatte, rien n’a fondamentalement changé. Calais et sa côte sont le passage obligé des désarrois humains de notre foutue planète. Nicolas Sarkozy, alors ministre de l’Intérieur, avait fermé en novembre 2002 ce lieu administré par la Croix-Rouge, qui cristallisait l’afflux migratoire (prévu pour 800 personnes, on termina à 1 800). Éric Besson, ministre de l’Immigration, fit nettoyer la jungle de Calais en septembre 2009 par les bulldozers et les CRS. On se souvient y avoir bu un thé en 2008 avec des jeunes Afghans perdus sous une tente de fortune pendant que d’autres jouaient au foot sur le terrain de l’usine Tioxide. Comme aujourd’hui. Comme demain.
Ces politiques ont-elles eu des résultats tangibles ? Autre qu’une baisse temporaire de la pression, éphémère comme un ministère. Non parce qu’après l’Afghanistan, l’Irak, la Somalie, l’Érythrée, le Darfour au Soudan d’alors, les guerres et les crises se succèdent intensément. De nouveau l’Irak, maintenant la Syrie, la Libye, toujours l’Érythrée, le Soudan, du sud désormais.
Un rapport de la police aux frontières, dévoilé par Le Figaro, évalue que du 1er janvier au 30 juin 2014, 61 591 migrants irréguliers ont débarqué en Italie contre 7 913 pour la même période en 2013 et 4 301 en 2012. D’où les tensions constatées à la frontière française avec l’Italie, puis à Calais, en bout de chaîne.
Selon certaines ONG comme France Terre d’Asile, le refus par l’Union européenne d’aider l’Italie à gérer les migrations aurait entraîné une certaine relâche d’un pays en première ligne (comme la Grèce). Rien ne sera jamais réglé à Calais. La solution doit être européenne, collective et humaine.
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