Haydée, à l'école des fous et aux côtés des migrants

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Haydée, à l’école des fous et aux côtés des migrants

27 janvier 2013 - La Nouvelle République - Béatrice Bossard

Haydée Sabéran, journaliste qui a grandi en Loir-et-Cher, revient y parler des migrants de Sangatte. Elle leur a dédié un livre, ainsi qu’à ceux qui les aident.

Il y a eu les années Sangate, cet immense hangar avec vue sur la mer, rempli de cabines de chantiers. Où ont pu s’entasser jusqu’à 1.500 clandestins alors que la commune ne compte que 800 habitants. Puis à sa fermeture en 2002, les " jungles " lui ont succédé. La jeune Loir-et-Chérienne Haydée Sabéran est arrivée dans la région Nord-Pas-de-Calais par hasard, parce qu’elle a trouvé du travail à Nord Éclair, son premier poste de journaliste. Rapidement elle devient correspondante pour Libération, dans une région très peuplée où les sujets de société ne manquent pas. « En 2000 j’ai découvert des Kurdes, des Iraniens et des Afghans qui étaient les principaux réfugiés de Sangate. Cette vie incroyable où chaque nuit ils tentaient de monter dans un camion pour l’Angleterre, parfois au péril de leur vie. Et j’ai reconnu parmi eux une langue, celle de mon père. Une langue perse que j’avais un peu oubliée, à laquelle j’ai rajouté les vocables " passeur ", " avocat ", " droits de l’homme ". »

Pendant près de treize ans, Haydée multiplie les reportages, devient spécialiste du sujet. Avec la frustration de ne pas suivre les histoires humaines. Quand elle revient, des migrants en ont chassé d’autres. D’où l’idée de consacrer neuf mois à un travail exclusif auprès d’eux, et d’en sortir un livre, " Ceux qui passent ", publié pendant la campagne présidentielle. « Il y a des jungles autour de toutes les aires d’autoroute de la région où les poids lourds sont censés s’arrêter. C’est un monde invisible, l’immense majorité des gens ignore leur existence. J’ai voulu parler de tous ceux qui les découvrent puis les aident. Certains sont liés à l’église, d’autres sont syndicalistes ou tout simplement retraités ! »

A l’écoute des maux du monde

Des gens ordinaires, tout comme ces migrants. Haydée raconte le courage d’adolescents partis seuls d’Afghanistan qui, s’ils s’en sortent, portent entre 10.000 et 15.000 € de dettes aux passeurs sur leurs épaules ; s’ils ne payent pas, leurs familles au pays sont en grand danger. Il y a aussi des Français ordinaires qui vont en Angleterre rendre visite à ceux qu’ils ont aidés. Ou Zahid, Afghan de 16 ans, qui frappe à une porte un 25 décembre. Il ne sait pas que c’est Noël, cette famille de Calais sur laquelle il tombe au hasard va l’adopter et lui permettre de faire des études.
Ces histoires incroyables, loin d’être achevées, Haydée Sabéran les partagera demain lundi à la clinique de La Chesnaie, à Chailles. Au sein de son école de psychiatrie institutionnelle, à l’écoute des maux du monde. Mais aussi des échanges humains. Cette rencontre n’a rien d’un hasard puisque la journaliste y a grandi, son père y était psychiatre. « J’étais heureuse de vivre là jusqu’à mes 12 ans. J’ai côtoyé des gens entourés d’humanité, cet échange naturel que j’ai pu avoir avec les fous fait partie de moi. Je pense que c’est ce qui m’a donné le goût d’être journaliste… »

« Ceux qui passent », d’Haydée Sabéran, Carnets nord, éditions Montparnasse.

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