L’espace Schengen recale la Bulgarie et la Roumanie
22 septembre 2011 - Libération - AFP
BRUXELLES (AFP) - La Bulgarie et la Roumanie ont été refoulées jeudi de l’espace Schengen, signe d’une réticence croissante des pays déjà membres à élargir cette zone européenne sans frontières à deux pays jugés inaptes à combattre les filières d’immigration clandestines.
Un seul refus suffit pour bloquer l’entrée, car toute nouvelle adhésion requiert l’unanimité des 25 membres de l’espace. Deux pays, les Pays-Bas et la Finlande ont dit "non" d’une manière très explicite, lors d’une réunion des ministres de l’Intérieur de l’Union européenne à Bruxelles.
Le ministre polonais de l’Intérieur Jerzy Miller, dont le pays préside l’UE, a pris acte de ce blocage et a déploré que la promesse faite à la Bulgarie et à la Roumanie ait été "rompue".
"Notre position est claire. Nous ne sommes pas favorables à une adhésion en ce moment", a déclaré le ministre néerlandais de l’Immigration, Gerd Leers, à Bruxelles.
"Ce que nous avons voulu éviter, c’est de décider aujourd’hui et de regretter plus tard", a-t-il dit, car "dans ce domaine, le retour est impossible".
"Notre position concernant leur adhésion est négative", a pour sa part déclaré la ministre de l’Interieur de la Finlande, Päivi Räsänen.
La présidence polonaise souhaite un arbitrage des chefs d’Etats lors de leur sommet mi-octobre, mais le ministre néerlandais a ruiné ses espoirs. "Ce serait peu sensé de faire remonter l’affaire au sommet, car nous ne voyons pas ce qui pourrait changer d’ici octobre", a-t-il affirmé.
"Nous devons avoir la certitude que l’acquis de Schengen est pleinement mis en oeuvre, notamment en ce qui concerne la lutte contre la corruption et le crime organisé", a insisté Gerd Leers.
"Si cela n’est pas le cas, alors vous avez une porte équipée des huit meilleurs verrous au monde, mais derrière cette porte, vous avez quelqu’un qui laisse passer tout le monde et cela pose un sérieux problème", a-t-il argumenté.
Une formule de compromis est sur la table. Elle prévoit une adhésion par étapes : ouverture des frontières aériennes et maritimes de Schengen à la Roumanie et à la Bulgarie au 31 octobre 2011, puis nouvelle décision en juillet 2012 pour les frontières terrestres.
"La formule permet encore de dire non en 2012", a souligné le secrétaire d’Etat belge en charge de l’immigration Melchior Wathelet.
Mais il s’est montré pessimiste. "Les Néerlandais ont dit non, et c’est non, point", a-t-il jugé. "Le dossier est devenu politique (...) et le problème est qu’on ne donne pas de perspective, ni de solution" à Sofia et Bucarest, a-t-il déploré.
Les difficultés rencontrées par la Grèce pour contrôler sa frontière avec la Turquie ont échaudé les autres membres de Schengen et expliquent leurs réticences à élargir l’espace à d’autres "maillons faibles", a souligné un diplomate.
Sofia et Bucarest, déjà rentrés trois ans après les autres pays d’Europe de l’Est dans l’UE, en 2007, car jugés à l’époque insuffisamment préparés, vivent mal ce refus et menacent de représailles.
Les autorités roumaines sont déjà passées aux actes. Elles ont bloqué à leurs frontières des camions transportant des tulipes hollandaises, officiellement au motif que les chargements ne sont pas munis d’un "passeport phytosanitaire", un document obligatoire dans l’UE.
La mesure a été levée jeudi, sous la pression des fleuristes roumains qui ont annoncé des pertes chiffrées à 300.000 euros.
Créé en 1985, l’espace Schengen permet à 400 millions d’Européens de circuler sans passeport sur le territoire formé par ses 25 membres —22 pays de l’UE (le Royaume-Uni, l’Irlande et Chypre n’ont pas adhéré), la Suisse, la Norvège et l’Islande)— qui ont accepté en mars 2011 d’intégrer le Liechtenstein, dont l’adhésion sera effective seulement à la fin de l’année.
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