Selon la police aux frontières, les migrants auraient presque disparu du Dunkerquois
3 décembre 2011 - La Voix du Nord - Estelle Jolivet
Il y a un an, le maire de Téteghem, Franck Dhersin, tirait la sonnette d’alarme en constatant la présencede plus de cent migrants dans la « jungle » du lac. Aujourd’hui, le directeur zonal de la police aux frontières, Éric Bosquillon, constate que les clandestins désertent le Dunkerquois.
1 Le constat « D’une manière générale, la pression migratoire sur le littoral a profondément évolué. En 2008- 2009, on a recensé jusqu’à 800 personnes dans la jungle de Calais, et plus d’un millier de migrants sur tout le littoral. Dans le Dunkerquois, on avait quatre implantations majeures : près du terminal-ferry de Loon-Plage, au Basroch à Grande-Synthe, près du lac de Téteghem et sur l’aire d’autoroute de Ghyvelde, où l’on avait surtout affaire à des réseaux vietnamiens. Ajoutez à cela le camp de Steenvoorde, où l’on rencontrait essentiellement une population originaire d’Érythrée.
Aujourd’hui ne subsiste de manière significative que l’implantation de Steenvoorde, où la municipalité a mis deux tentes à disposition des migrants pour l’hiver. À Loon-Plage, il n’y a plus de migrants depuis plus d’un an à Ghyvelde, les coups portés à la filière vietnamienne ontporté leurs fruits à Grande-Synthe et Téteghem, nos opérations régulières, hebdomadaires, ont fait reculer le nombre de migrants à une dizaine dans chaque endroit. Le constat est d’ailleurs partagé par les associations. Au total, sur les arrondissements de Calais et Dunkerque, on peut chiffrer la population de migrants "visibles" actuellement à 300, 400 personnes. Il est difficile de donner un compte plus précis. Je peux aussi dire que le nombre d’interpellation a beaucoup diminué, passant de 35 000 en 2008 à 10 000 en 2011 (sachant qu’un même individu peut être interpellé plusieurs fois). Pour nous, cette situation est satisfaisante et nous espérons qu’elle durera, mais il s’agit évidemment d’une vision policière des faits. »
2 Les filières « Ce résultat s’explique en partie par le travail réalisé sur les filières d’immigration irrégulière. Une vingtaine d’entre elles ont été démantelées cette année. 900 interpellations de trafiquants présumés ont été effectuées dans notre zone (1) en 2011, dont 750 sur le littoral. Le profil des mis en cause va de celui qui aide un migrant à monter dans un camion à l’organisateur de réseau. Les passeurs kurdes tiennent toujours la dragée haute sur le territoire. Ils n’ont pas été délogés et n’hésitent d’ailleurs pas à utiliser des armes à feu pour imposer leur autorité. Les Vietnamiens sont présents, mais seulement sur des "niches", comme à Angres (62) et Ghyvelde. »
3 Pas d’effet « printemps arabe » « On n’a pas vu de Libyens ou de Tunisiens sur le littoral. Par contre, les Érythréens sont devenus la première nationalité représentée au niveau des interpellations, devant les Afghans et les Irakiens. L’immigration tunisienne a plus vocation à s’intégrer sur le territoire français qu’à transiter vers le Royaume-Uni. »
4 Charters ? « Certaines populations ont fait l’objet de mesures d’éloignement, mais seule la préfecture est habilitée à divulguer les chiffres. Je peux seulement dire que c’est assez rare. Les gens qu’on interpelle n’ont presque jamais de passeport, ce qui pose problème lorsqu’il faut prouver que tel est Afghan ou Irakien. Il faut également que l’autorité consulaire du pays concerné délivre un laisser-passer. Et c’est compliqué. Le plus souvent, nous appliquons des mesures de réadmission vers un autre pays d’Europe dans lequel le migrant est passé. Mais depuis quelque temps, nous ne les renvoyons plus en Grèce, jugé comme pas suffisamment sûre. »
5 Et ailleurs... « Les clandestins que nous avions par le passé se sont réfugiés ailleurs, vers des sites plus hospitaliers ou en Belgique. Sur les sites d’embarquement, on découvre encore des centaines de clandestins tous les mois. C’est bien qu’ils sont montés quelque part. Je pense cependant que le passage est devenu plus difficile et que d’autres modes opératoires ont émergé. L’attractivité du Royaume-Uni a aussi peut-être, de ce fait, diminué, au profit des pays scandinaves. » •
(1) La direction zonale de la Police aux frontières de Lille gère un territoire correspondant aux régions Nord - Pas-de-Calais et Picardie.
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