Steenvoorde : les migrants deviennent indésirables, l'association Terre d'errance appelle à l'aide

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Steenvoorde : les migrants deviennent indésirables, l’association Terre d’errance appelle à l’aide

5 juillet 2014 - La Voix du Nord - Christophe Le-bas

Plus de douches, plus de terrain municipal et plus de campement de migrants. Jean-Pierre Bataille veut juguler l’afflux de migrants à Steenvoorde. L’association Terre d’errance, qui leur vient en aide, ne comprend pas ce durcissement et estime que cela ne résoudra pas le problème.

Le vent tourne à la mairie de Steenvoorde. À compter du 1er septembre, la municipalité ne fournira plus de douches et le terrain municipal ne sera pas mis à la disposition des migrants en novembre.

L’aire d’autoroute attire les migrants

Sans compter la volonté de destruction du camp permanent de migrants, à proximité de l’aire d’autoroute. « Cette destruction ne changera rien. Les migrants se disperseront, mais ils seront toujours là. Ce qui attire les migrants, c’est l’aire d’autoroute ». Damien Defrance, président de l’association, juge néfaste ce raidissement municipal.

Selon lui, les problèmes seraient encore plus grands si le camp n’existait pas. « Ce sera encore plus compliqué à gérer car on ne saura plus où ils sont. Et la suppression des douches posera des problèmes sanitaires. On l’a vu à Calais, avec une épidémie de gale. » Tout a basculé en avril. Le propriétaire du terrain occupé par les migrants a reçu une lettre cosignée par le sous-préfet et le maire, Jean-Pierre Bataille. « Cette lettre demandait le déboisement du terrain », explique le président de l’association. Or, le propriétaire de ce petit bosquet ne s’était jamais plaint de l’occupation. « Le 17 juin, il y a eu une réunion entre le propriétaire, l’association, le maire, les gendarmes, le représentant du sous-préfet, les renseignements généraux, la police de l’air et des frontières… J’étais scotché », se souvient l’abbé Lener, vice-président de Terre d’errance. C’est à ce moment que la décision du déboisement a été amorcée. Désemparé, l’abbé Lener ne comprend pas cette décision de la municipalité. « Chaque année, nous devions négocier pour obtenir le terrain. Ça se faisait sans tension. Nous aimerions vraiment pouvoir garder les douches. Au moins ça. De toute façon, ces gens ne veulent pas rester à Steenvoorde. Ils veulent partir. » L’Eldorado des migrants, c’est l’Angleterre. Steenvoorde, et son aire d’autoroute, sont simplement sur la route.

« Envoyer un signal fort pour amorcer un reflux »

Jean-Pierre Bataille, maire de Steenvoorde, explique ce qui a motivé sa décision.

Qu’est-ce qui a motivé la décision de supprimer l’accès aux douches et au terrain communal ?

« Il n’y a qu’un seul déclencheur : l’augmentation du nombre de migrants. L’afflux est trop important, même pour l’association Terre d’errance. L’accord moral mentionnait la prise en charge de 25migrants. Aujourd’hui, il y en a quasiment 100. Qui nous dit que, demain, il n’y en aura pas 200 ? Il faut un signal fort pour amorcer un reflux. Les services de l’État doivent nous aider. »

Que réclamez-vous de l’État ?

« De la fermeté, le démantèlement des réseaux de passeurs et que la circulation des migrants soit moins fluide. Car là, il doit y avoir une pancarte Steenvoorde à Lampedusa (île de Méditerranée ou les migrants s’échouent régulièrement). L’immigration est une question internationale qu’une seule ville ne peut pas gérer. »

En tant qu’élu UMP, cette fermeté ne vise-t-elle pas à coller à la ligne du parti ?

« Je suis encarté UMP, mais le parti ne dirige ni ma conscience ni mes actions. »

Y a-t-il un revirement vis-à-vis de votre posture humaniste ?

« Je suis tiraillé entre mes sentiments et ceux de la population. Mais il faut envoyer un signal fort, avant l’explosion. Car si, demain, il y a 200 migrants, cela peut entraîner des luttes, du racket et de la prostitution. À ce sujet, le courriel du dirigeant de la station service, sur l’aire d’autoroute, m’a fait dire qu’il fallait changer. »

Le départ de l’abbé Lener, pour une autre paroisse, est-il le déclencheur de cette fermeté envers les migrants ?

« Il n’y a aucun calcul politique. Il sait que la situation est difficile et nos relations ont toujours été franches. Nous sommes amis. »

Un afflux ?

Le flux de migrants varie chaque année et selon la saison. Pour l’heure, il y en aurait 90. « Il y a plus de monde l’été et une diminution l’hiver. Ils étaient une quarantaine à cette période. Parfois on peut tomber à une dizaine », estime Anne-Marie Defrance, membre de l’association Terre d’errance, en lien étroit avec le camp. « Beaucoup viennent d’Afrique mais aussi de Calais. Ils sont arrivés après les démantèlements récents. » En 2008, à la naissance de l’association, entre 25 et 30 migrants étaient pris en charge, pendant l’hiver. Et à peu près autant l’été. « Aujourd’hui, il y a plus de contrôle à la frontière avec l’Angleterre. Les migrants passent moins et restent en France », explique Damion Defrance, président de l’association.

L’association a réuni les migrants pour exposer la décision de la mairie. Mais, selon l’abbé Lener, leur détermination ne faiblit pas. « Ils prendraient tous les risques pour aller en Angleterre ».

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