Trente-huit migrants accueillis cet hiver à Bailleul : « On est un point sur leur route »

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Trente-huit migrants accueillis cet hiver à Bailleul : « On est un point sur leur route »

16 mai 2011 - La Voix du Nord - Raphaëlle Remande

Le terrain derrière la piscine de Bailleul, à l’abri de grands arbres, est désormais vide. Les deux tentes militaires ont été démontées, et la caravane du camp médical d’accueil des migrants a été retirée. Ce camp humanitaire a dû être mis en place pour la seconde année. Il est géré par l’association Flandre Terre solidaire, dont Claire Cleenewerck est la présidente.

Combien de personnes ont été accueillies cet hiver au camp ?

« En tout, trente-huit personnes sont passées, parfois deux jours, parfois plus... Nous avons accueilli des Afghans, des Pakistanais, des Soudanais, des Érythréens, des Vietnamiens, des Palestiniens. À Bailleul, tout le monde vit ensemble. C’est la spécificité du camp. Dans les autres comme à Calais, les migrants se regroupent souvent par origine ethnique. Ici, c’est un petit miracle. Un Afghan nous a dit qu’il était hyper raciste avant d’arriver. Au camp, son meilleur copain était un Soudanais. Cette ambiance, c’est grâce au travail des bénévoles. »

Combien y a-t-il de bénévoles justement ?

« C’est difficile à dire... Il y a plusieurs équipes : repas, douche, ménage, médical, matériel. Des bénévoles sont là presque 24h/24, même la nuit. Sept médecins entièrement bénévoles ont donné de leur temps avec une grande générosité. »

D’où viennent les migrants que vous accueillez ?

« Notre objectif, c’est d’être un camp médical. On n’accepte pas les gens qui se présentent spontanément. Ils doivent passer par une association, ça peut être le Haut Commissariat aux réfugiés (HCR), l’association Salam, le 115... Après, moi je ne fais pas d’enquête sur leur vie. Je ne sais pas par où ils sont passés, ce n’est pas notre but. »

De quels maux souffrent-ils ?

« C’est très divers, ça peut être des blessures. Le camp s’est prolongé après le 30 mars cette année, car nous attendions deux opérations chirurgicales lourdes pour deux personnes. Nous avons aussi eu une famille avec un bébé de huit jours. Un bébé de huit jours, on a considéré que c’était médical. »

Par rapport à l’année dernière, la population des migrants a-t-elle changé ?

« Nous avons eu une population un peu plus difficile. Il y a plus de pressions dans les camps, à Calais. avec les passeurs. Les migrants arrivent plus stressés. Il ne faut pas se faire d’illusion, il y avait de la tension aussi dans la Jungle, ce n’était pas l’idéal mais il y a encore plus aujourd’hui. »

Y a-t-il eu des changements par rapport à l’année dernière ?

« Au niveau de l’organisation, nous avons installé une caravane en plus des deux tentes. Ça permettait d’avoir des entretiens plus discrets et surtout aux infirmières et médecins de faire des consultations. On a aussi pu stocker des médicaments. »

Quel bilan tirez-vous, personnellement ?

« La satisfaction du devoir accompli. Le sentiment d’avoir fait ce pour quoi on était fait. Le but, ici, c’est que les migrants vraiment malades puissent récupérer. Nous ne sommes pas un camp d’accueil. Il faut qu’on respecte ce pour quoi on a eu une autorisation de la mairie, c’est essentiel. »

Quelle est la réaction des Bailleulois à l’égard du camp ?

« Nous n’avons pas eu de réactions. Souvent, les gens ne savent même pas. Le camp ne fait pas de bruit et il ne faut surtout pas que ça gêne. »

Le camp fermé, savez-vous ce que deviennent les migrants ?

« Ceux qui sont demandeurs d’asile ont normalement le droit à un hébergement. Quand ils sont malades, on insiste d’autant plus. Les autres retournent à la rue. Quand ils sont guéris, nous n’avons pas de solutions pour eux. On ne peut pas aller au-delà de ce qui est de notre ressort. »

Beaucoup retournent sur la côte, non...

« Je n’en sais rien. Moi, par principe, je me dis qu’on est un point sur leur route. Je ne veux pas être un fil à leur patte, notre association n’est pas là pour créer un port d’attache. Ils ont fait six à sept mille kilomètres sans nous. Après, leur chemin continue... »

Et l’année prochaine, vous repartez ?

« Si c’est nécessaire. On ne fait pas un camp pour faire un camp, pour se faire plaisir. C’est seulement en cas de besoin. »

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